Dans le jardin de la paroisse de Carouge, fleurs, fruits et légumes s’épanouissent. C’est là que des enfants apprennent le soin de la création, les mains directement dans la terre.

Le jardin de vie. Voilà le nom du potager de la paroisse de Carouge, choisi par des enfants de l’Église évangélique libre de Genève. Lorsque la paroisse a réalisé son écodiagnostic, le jardin était son principal atout, indique Carine Meyer. C’est elle qui connaissait l’outil et qui en a parlé dans sa communauté. Deux paroissiens l’ont alors rejointe, dont André Leitner.

André n’a pas attendu l’écodiagnostic pour s’occuper du jardin. Il y a quelques années, voyant le terrain en friche, il l’a peu à peu transformé en un généreux potager qui ne manque pas d’impressionner le voisinage. « Le Seigneur a mis plein de petites bestioles qui m’ont aidé », raconte-t-il. « Par endroits, le sol était plein de vers de terre. » Il a aussi introduit des gestes de permaculture comme le paillage qui permet notamment d’économiser de l’eau et de multiplier la vie microbienne.

De son côté. Carine terminait ses études gymnasiales. Pour son travail de maturité, elle a choisi de réaliser un projet pour les enfants dans le jardin de la paroisse. C’est ainsi que les premières actions du groupe se sont centrées sur l’enseignement aux enfants.

Leur approche est d’abord pratique. Les enfants participent aux tâches de A à Z, de la préparation de la terre jusqu’à la cueillette et, bien sûr, la dégustation. Certain·e·s ont la responsabilité des plantes qu’ils ont semées. « Si la plante souffre ou meurt, c’est une prise de conscience pour eux », explique André. « Ils comprennent que les plantes ont besoin de soin. Heureusement, ils apprennent aussi qu’il est possible de recommencer l’année suivante. » Carine relève également l’aspect symbolique du travail : « Les mauvaises herbes du jardin me font réfléchir aux mauvaises herbes qui poussent dans son cœur. »

André se souvient de la première fois qu’un groupe d’enfants est arrivé « avec des gants jusque-là », dit-il en indiquant ses coudes. Le voyant plonger ses mains nues dans la terre, les réactions ont fusé : « Beurk, c’est sale ! » Le paroissien a alors invité les enfants à essayer. Plus tard, s’étant fait une entaille, il a placé un petit escargot sur sa peau pour que celui-ci la recouvre de bave. Les enfants ont à nouveau affiché une mine dégoûtée. « Je leur ai expliqué que la bave faisait office de pansement », se souvient-il. « Depuis, ils viennent sans gants. Et les parents commencent aussi à s’interroger, pas par la moralisation, mais par la pratique. »

Pour Carine, il s’agit de sensibiliser par l’expérience. Elle souligne l’importance d’initier un changement en profondeur, « et pas simplement de changer trois ampoules. » André ajoute : « Il faut qu’on le vive, le montre et qu’on emmène les gens avec nous. » Et cela va au-delà de la communauté : quand il s’occupe des rosiers qui donnent sur la rue, André discute parfois avec des passant·e·s. « La conversation s’engage facilement. L’ouverture sur l’extérieur est importante. »

Outre le jardinage à proprement dit, le groupe a proposé d’autres activités comme la fabrication d’hôtels à insectes, deux rencontres Détox’ la Terre ou la participation à un vide grenier organisé par la Ville de Carouge. Au marché, l’Église vend parfois des sirops préparés avec la menthe ou d’autres plantes du jardin dans des bouteilles consignées. De plus, le mobilier extérieur est en grande partie récupéré. C’est le cas d’une grande table à manger qui, dans une première vie, était le bureau du pasteur.

« On reste un peu sur notre faim, remarquent Carine et André, mais il faut accepter les limites de ce qu’on peut faire. » La paroissienne évoque la difficulté de la disponibilité : « Tout cela prend du temps ! Cela contraste avec la frénésie de notre mode de vie. » Elle s’étonne également de ne pas voir plus de jeunes impliqué·e·s. Il n’empêche que le résultat est là. « C’est le fruit d’un effort de six ans, dit André. La base est là et, chaque année, quelque chose de plus est construit par-dessus. Comme dans la foi. »